Alors que la vasque des Tuileries s’est éteinte il y a quelques semaines, Falaise &MOI a été à la rencontre de deux falaisiens volontaires à Paris cet été. Échanges avec Fabienne Auvray et Miguel Barbera.
A quel moment avez-vous décidé d’être volontaire et pour quelles raisons ?
Fabienne Auvray : Cela fait déjà plus de 10 ans que je suis bénévole pour la Fédération Française de Judo sur de grands évènements, comme le Grand Slam par exemple. Pour les jeux de Tokyo en 2020, j’avais eu cette envie de participer, mais on sait maintenant que ces Jeux au Japon ne se sont pas tout à fait passés comme prévu. Alors, quand via la fédération, il a été possible de postuler avec un mois d’avance sur le grand public. J’ai donc postulé en février 2023.
Mon engagement pour le monde sportif était déjà très fort, mais là… c’était les Jeux Olympiques à la maison ! Je ne pouvais pas rater ça !
Miguel Barbera : Depuis l’attribution des Jeux Olympiques à la France, je souhaitais m’investir dans l’organisation. Mon engagement bénévole, dans différentes associations, m’a naturellement poussé à candidater dès 2023. J’avais déjà candidaté pour les Championnats d’Europe d’athlétisme qui n’ont malheureusement pu se dérouler pour cause de covid. Alors, pour Paris 2024, il était hors de question de laisser passer cette nouvelle opportunité.
Est-ce que le processus de recrutement été long ?
Fabienne Auvray : C’était assez long, mais très bien articulé. Lors du dépôt de dossier, il fallait répondre à 2 séries de 90 questions qui permettaient à la plateforme de candidature de proposer 10 profils de postes qui nous ont été présentés en termes d’affinités en fonction de nos réponses. Ça permet déjà d’aligner nos compétences avec les besoins. J’ai ensuite su en octobre 2023 que j’étais retenue et sur quelles missions. Il y a ensuite eu la Convention des volontaires, la réception des plannings et de l’uniforme, la formation sur site et enfin le 25/07, le début de l’aventure pour moi.
Miguel Barbera : Le processus de sélection était très bien conçu. Après avoir répondu à une série de questions, j’ai pu choisir mes sports de prédilection parmi une offre très variée. C’est sur cette base que les missions ont ensuite été attribuées. Après une dernière étape d’enquête administrative, j’ai eu la chance d’être sélectionné parmi les 300 000 candidats. Depuis fin 2023, je suis plongé dans les préparatifs : formations e-learning, sur site, remise de la tenue de bénévole… Les informations reçues ainsi que les formations m’ont permis d’être prêt le jour J.
Sur quel(s) poste(s) avez-vous été affecté ?
Fabienne Auvray : Ma mission se déroulait au Champs de Mars, auprès des judokas et de leur staff. Je tenais le « Point informations sportives ». Il s’agit d’un comptoir installé dans le salon des athlètes, avant la chambre d’appel. Ce comptoir leur permet de réserver les créneaux d’entraînement avant les compétitions. Mais attention, certaines délégations souhaitent des entraînements à huis clos, d’autres ne peuvent pas s’entraîner en même temps de certaines autres équipes pour des raisons politique notamment… Bref, il faut gérer les susceptibilités et les enjeux de géopolitique auxquels on ne pense pas d’emblée. J’avais également la responsabilité de la gestion des repas et dans ce genre d’organisation, il y a toujours un petit coup de main à donner aux autres pour changer des tapis, ou déplacer un podium.
Miguel Barbera : Durant les Jeux Olympiques, ma mission était la sécurisation d’une partie du parcours de cyclisme sur route ainsi que des marathons. Pour le cyclisme, j’ai eu la chance d’être affecté rue Lepic (près de la place Pigalle), qui est en montée, ce qui m’a permis de voir les athlètes de près… et quelle ambiance ! Pour le marathon, direction le Louvre, avec un environnement à couper le souffle. Enfin, sur les jeux Paralympiques, c’est au Stade de France sur les épreuves d’Athlétisme que j’ai assuré des missions d’accueil du public.
Comment avez-vous trouvé l’ambiance ? Le public ?
Fabienne Auvray : Mon poste était assez éloigné du public, mais même de loin, on ressentait une ambiance formidable ! Et en dehors de ma mission, dans le métro, les gens n’hésitaient pas à nous remercier, et ça, c’est précieux.
Miguel Barbera : Être au cœur des épreuves, c’était vraiment une expérience indescriptible. Vous êtes comme « porté » par une vague d’émotions positives intenses, de bonnes ondes, de sympathie et de ferveur. Il y a eu des moments comme suspendus, où rien d’autre n’existe que ce que vous vivez, à cet instant, avec des gens que vous ne connaissez pas, mais qui vivent la même émotion que vous. C’est une expérience très forte.
Pensez-vous que les étrangers, ont aimé ces Jeux de Paris ?
Fabienne Auvray : Je garderai surtout le souvenir d’un public souriant, content d’être là, dans un Paris sans voiture et totalement sécurisé. Les déplacements étaient fluides et en cas d’accros, il y avait toujours quelqu’un pour aider, pour orienter.
Miguel Barbera : Je le pense en effet. Les étrangers ont unanimement salué la qualité de l’organisation de ces jeux. L’accueil chaleureux, le niveau élevé des compétitions et la beauté des sites ont contribué à faire de cet événement un succès retentissant. L’intégration harmonieuse des infrastructures sportives dans le tissu urbain ont renforcé l’attrait de ces jeux.
Quel sera votre meilleur souvenir ?
Fabienne Auvray : Un après-midi, un responsable de la gestion des athlètes est venu me chercher pour me confier une mission de chaperonnage. Il s’agissait, avec un agent du contrôle anti-dopage, de prendre en charge un judoka tadjik qui venait de décrocher une médaille de bronze. Il fallait l’escorter et gérer son planning dès sa descente de tatami jusqu’au podium, en passant par la zone mixte, le retour auprès de son staff, le vestiaire, etc… C’est à ce moment-là que j’ai pu voir les médailles de près, sur leur plateau, juste avant le podium. Je mesure la chance que j’ai eue.
Miguel Barbera : C’est très difficile de ne faire émerger qu’un seul moment… Il faut dire que j’ai eu une double chance durant ces jeux : non seulement j’ai pu faire partie des 45.000 volontaires, mais j’ai également eu la chance d’avoir un dossard pour courir le marathon pour tous. J’ai donc à la fois participé au marathon homme et femme en tant que volontaire, mais j’ai aussi pu vivre une expérience sportive en empruntant le même parcours, avec un public incroyable, qui nous a accompagnés toute la nuit, avec une énergie folle.
Vous avez des regrets ?
Fabienne Auvray : Je n’ai pas un regret, mais un demi-regret. Lors de nos pauses, il nous était possible d’accéder au haut des gradins afin de voir des combats. Mais je me suis rendue compte au bout de quelques jours, qu’il était possible d’accéder à bien d’autres endroits, et d’avoir ainsi la chance d’observer les athlètes, les équipes, ou encore le public, sous un autre angle. Si j’avais su, j’en aurais profité plus tôt.
Miguel Barbera : Aucun regret, c’était formidable !
Une expérience à renouveler ?
Fabienne Auvray : Évidemment, sans aucun doute. Participer à un évènement de cette ampleur démultiplie les émotions, permet des rencontres que l’on ne ferait pas en temps ordinaire. On a ainsi la chance de vivre des moments qui semblent parfois hors du temps, comme suspendus à un résultat, à une performance qui tiennent vraiment de l’extra-ordinaire.
Miguel Barbera : Bien entendu. Cette expérience sur les jeux m’a définitivement convaincu de me lancer dans de nouvelles expériences. Après avoir longuement échangé avec d’autres volontaires qui ont été mobilisés sur d’autres évènements, j’ai décidé de postuler à une manche de coupe du monde de biathlon au Grand Bornand.
J’ai également eu la chance de rencontrer Yuko Arimori, première femme japonaise médaillée au marathon olympique. Lors de la discussion, elle m’a incité à m’inscrire pour être volontaire aux Mondiaux d’Athlétisme de 2025 au Japon, cette idée fait son chemin… En tout cas, outre le fait de faire de belles rencontres et de se sentir utile, l’envie de partager à nouveau des moments uniques est très forte.